Alors que la guerre menée par Israël contre la population de Gaza entre dans une nouvelle phase d’horreur, le ressentiment qui s’est accumulé à l’intérieur même de l’État israélien explose et fragilise encore plus le gouvernement de Netanyahou.
Lorsqu’il a proclamé son intention de conquérir et d’occuper Gaza, un million de personnes — soit 10 % de la population — sont descendues dans la rue pour s’y opposer. Les familles des otages, elles, ont appelé à une reprise de la grève.

Elles sont désormais soutenues par des secteurs du capital et par des membres haut placés de la classe dirigeante, qui sont inquiets pour leurs profits et qui veulent en finir avec la fuite en avant génocidaire de Netanyahou.
Le mouvement de contestation s’amplifie : de plus en plus de jeunes refusent ouvertement de servir dans l’armée, et dénoncent la politique génocidaire de Netanyahou. L’armée israélienne (IDF) fait face à la plus grande vague de refus depuis l’invasion du Liban en 1982 — un désaveu historique.
Pas moins de 140 000 israéliens de toutes professions, incluant même des agents du Mossad, ont signé des lettres publiques exigeant la fin de la guerre et la libération immédiate des otages. Le soutien au pouvoir s’effondre, y compris dans ses bastions traditionnels. Voir l’armée elle-même touchée par la contestation est un signal fort : le régime vacille.
Ce rejet a plusieurs causes, d’une part l’enlisement de la guerre, l’incapacité de Netanyahou à libérer les otages, et d’autre part, le rejet du génocide qui monte progressivement dans les masses israéliennes.
Depuis plus de 15 ans, Netanyahou s’accroche au pouvoir à coups de manœuvres politiciennes et de propagande sécuritaire. Accusé de corruption, il a échappé à la prison et aux protestations qui commençaient à se former en instrumentalisant la guerre. Il se présente en rempart contre un « ennemi » qu’il agite sans cesse : le monde arabe. Mais la façade craque.
Les divisions au sein de la classe dirigeante ne datent pas d’hier — et aujourd’hui, même la guerre ne suffit plus à les masquer. En ne faisant qu’allonger la liste de meurtres à son actif (assassinats de masse au Liban, bombardements en Syrie, attaques contre des sites nucléaires en Iran, …) le gouvernement israélien ne fait que rendre la région plus instable et dangereuse pour les investisseurs.
Par ailleurs, la guerre n’aurait pas pu durer sans le soutien actif des États-Unis. Mais même ses alliés occidentaux ne peuvent pas empêcher la fracture du régime israélien. Les États-Unis eux-mêmes, comme ses alliés européens, doivent jongler entre la défense de leurs intérêts impérialistes et la gestion de l’indignation au sein de leur propre pays.
Après des mois de guerre, le Hamas n’a toujours pas été détruit et tous les otages israéliens n’ont pas été libérés. Une large majorité de la population israélienne (plus de 80 %) continue de soutenir l’expulsion des Gazaouis mais ne soutient plus cette guerre interminable. C’est 76 % des israéliens et des israéliennes qui souhaitent désormais la démission de Netanyahou.
D’autant plus qu’à l’internationale, la pression monte face au calvaire des Palestiniens. Dans le monde entier on ne peut pas échapper aux images et nouvelles effroyables… À Gaza la famine est organisée par l’armée israélienne, les hôpitaux sont rasés, les habitations pulvérisées et les civils massacrés sans répit. Les journalistes y sont visés de manière délibérée. Le 10 août dernier, les cinq journalistes de la chaîne internationale Al-Jazeera ont été assassinés par Israël.
Il devient de plus en plus difficile pour les gouvernements occidentaux de soutenir leur allié au Moyen-Orient sans provoquer une vague de dégoût généralisé. Cette campagne d’extermination du peuple palestinien révèle les véritables intérêts des classes dirigeantes impérialistes. Elles n’ont que faire de la sécurité des juifs, ni de la lutte contre le terrorisme. Ce n’est qu’un prétexte pour servir leurs intérêts économiques et préserver leurs sphères d’influence.
Face à la pression populaire, certains gouvernements – Macron, Starmer, Carney – feignent de hausser le ton en agitant la « menace » de reconnaître un État palestinien. Même l’Allemagne, le deuxième fournisseur d’armes à Israël, a dû ralentir ses livraisons. Le soutien des États-Unis reste la clé de voûte du gouvernement de Netanyahou. Pourtant, même ce pilier vacille : une partie des républicains commencent à prendre leurs distances. Pour Trump, la situation pourrait devenir trop risquée pour maintenir le jeu du soutien inconditionnel encore longtemps.
Même avec le soutien de l’Occident, la guerre coûte énormément à Israël. La banque centrale israélienne estime que la guerre sur les six fronts a déjà coûté l’équivalent de 10 pour cent du PIB annuel israélien. Les capitalistes ont besoin de stabilité pour investir, pas d’une guerre sans fin. Et la situation n’a jamais été aussi instable. Environ 1 700 des 20 000 millionnaires de Tel-Aviv ont quitté le pays depuis le début de la guerre. La classe dominante commence à abandonner le navire, tandis que les travailleurs et les travailleuses continuent de payer ces manœuvres de leur vie.

Pendant que Netanyahou poursuit sa politique génocidaire, l’indignation ne faiblit pas à l’internationale. Partout dans le monde s’organisent des protestations massives, des grèves étudiantes, des prises de parole de célébrités… Des flottilles prennent la mer pour forcer le blocage de l’aide humanitaire à Gaza. Une union internationale, la Global Sumud Flotilla, a mis à l’eau une douzaine de navires de différents pays qui sont partis vers Gaza le 31 août.
Ces actions et le soutien qu’elles reçoivent montrent que la colère et l’envie d’agir est toujours présente. Ces activistes déploient des forces monumentales pour tenter quelque chose et nous saluons leur courage et leur détermination ! Mais pour plus d’efficacité, il faut tirer les leçons des luttes précédentes. De telles actions isolées ne sont pas de taille face à un État impérialiste soutenu par la plus grande puissance mondiale. C’est notre nombre qui fait notre force, ainsi que la place qu’occupent les travailleurs et travailleuses du monde dans la production en général et dans l’envoi de ressources aux armées israéliennes en particulier.
Nous devons aussi soutenir les mouvements progressistes de contestations qui apparaissent au sein d’Israël, car ce ne sont pas les bourgeois libéraux qui apporteront la paix – ni pour les palestiniens, ni pour les israéliens. Mais surtout, nous devons retourner notre colère contre nos propres classes dirigeantes occidentales, ceux qui imposent l’austérité, la répression, le racisme et la guerre partout sur la planète. La lutte contre l’impérialisme ne diffère pas des autres luttes.
C’est la même classe dominante qui sert ses propres intérêts contre les travailleurs et travailleuses du monde entier. En réalité, il n’y a qu’une seule lutte : celle des exploités contre leurs exploiteurs.
Le rôle des révolutionnaires est clair : dénoncer sans relâche les intérêts qui se cachent derrière chaque manœuvre gouvernementale, rendre visibles les contradictions de classes, et organiser la riposte.